20 HISTOIRES DE CIRCOSTRADA - CÉLÉBRATION DU 20E ANNIVERSAIRE DU RÉSEAU : ESPACES COMMUNS - UN ARTICLE DE LASSINA KONE

La réunion générale annuelle de 2023 à Split, en Croatie, marque aussi l’entrée de ma structure, Don Sen Folo, dans le réseau Circostrada. Cette première rencontre m’a permis de prendre conscience de ce qu’est le réseau et de l’importance des connexions avec l’autre par-delà des frontières. Je viens d’un pays, le Mali, où la question de la communauté est très présente et vivante. Communauté imposée, naturelle, ou choisie, cela m’interroge dans les pratiques artistiques sur comment connecter ? Comment tisser des liens avec les autres ? Ce sont les rencontres et les expériences vécues avec d’autres qui ont forgé mon chemin professionnel en tant que chorégraphe, mais aussi en tant que directeur artistique de ma structure. Aujourd’hui, je crée et transmets mon écriture chorégraphique dans l’espace public en Afrique. Je suis parti du constat que ma propre communauté ne connaissait pas la danse contemporaine et que j’avais le devoir, en tant qu’artiste, de leur apporter cela. Pour moi, la solution a toujours été de travailler avec ce que j’ai, ce que je suis. En Afrique, lorsque l’on est artiste et que l’on veut vivre de notre travail, cela implique très souvent un déracinement, un exil vers l’Europe. Les artistes africains sont aujourd’hui face à l’urgence de travailler chez eux·elles et d’ériger un modèle de travail et de représentation en adéquation avec leurs quotidiens, leurs cultures, leurs réalités. Il faut qu’une génération s’approprie cette question, et se donne les moyens de créer une vision pour l’avenir de l’art en Afrique. Pour que cela existe, il faut, je pense, considérer la communauté, car l’art est un façonneur d’unité. Cette nouvelle proposition de création en espace public peut devenir un nouveau modèle africain. Si la création contemporaine trouvait sa place dans le quotidien de chaque personne et qu’elle devenait un élément de la construction de chaque individu, l’art trouverait naturellement sa place dans notre société. Nos artistes ne seraient plus alors dans l’obligation de s’exiler. À Split, j’ai vu ces liens qui étaient déjà là. J’ai vu que quel que soit l’endroit où ces personnes se trouvent, quel que soit l’endroit où elles vivent, ensemble, elles ont une vision. Elles partagent cette envie puissante de changer les choses en créant de nouvelles possibilités. Chez moi, la vie culturelle et la création se trouvent à chaque coin de rue, et voir cela dans un autre pays et que cela soit fédéré par un événement, des gens, m’a vraiment fait réfléchir sur la vision que j’ai pour ma propre société. Cela m’a donné envie de la questionner, mais aussi de questionner le monde avec les membres du réseau, pour ensemble faire renaître ce monde. Il est inspirant Circostrada !