J’ai rejoint l’équipe de coordination de Circostrada en 2015, j’avais alors 25 ans. À l’époque, notre petite équipe était composée de deux personnes au sein de HorsLesMurs, et le réseau comptait quant à lui une soixantaine de membres à travers l’Europe. C’était très excitant. Le réseau se dotait de moyens et d’outils, structurait son activité, réfléchissait à sa charte de valeurs et défendait ses spécificités auprès des instances européennes, peu connaisseuses de la vitalité, du potentiel et des énergies fédératrices générés par des disciplines artistiques encore peu reconnues dans le paysage institutionnel que représentaient les arts en espace public et les arts du cirque. Et, pourtant, de la Finlande aux Balkans, du Portugal à la République tchèque, j’ai été témoin d’une multitude d’initiatives, qui - des poumons urbains des capitales jusqu’aux confins des campagnes d’Europe -, réinventaient une relation avec les habitants, réenchantaient l’espace public, retissaient du lien humain là où il avait pu être abimé, invitaient l’art partout, et surtout là où on l’attendait le moins. Je découvrais toute une communauté européenne d’artistes et de faiseurs·euses de liens, qui chacun un peu défricheur dans sa parcelle d’Europe, partageaient une furieuse envie de faire «réseau». J’y suis restée près de six ans. Six années de rencontres et de discussions passionnantes avec des professionnel·le·s et artistes engagé·e·s : des événements FRESH STREET et FRESH CIRCUS à Paris, Barcelone, Galway, Bruxelles, Auch ; des voyages de recherches dans des pays extra-européens au Japon, en Corée du Sud, en Ethiopie, sans compter une multitude de réunions générales, de groupes de travail et de comités de pilotage accueillis à chaque édition chez un membre du réseau pour découvrir un paysage artistique différent d’Europe. Je garde une foule de souvenirs de ce passage à la coordination du réseau. Parmi les plus marquants, je me souviendrais longtemps de la soif d’arts de rue du public sud-coréen au Seoul Street Arts festival, ou encore d’une balade jonglée d’une grande force poétique sur Onis Oír, la plus petite et sauvage des îles d’Aaran au large de Galway, lors du rendez-vous FRESH STREET#3 accueilli par le réseau irlandais des arts de la rue ISACS. Si Circostrada m’aura permis de rencontrer des personnes inspirantes aux quatre coins du globe, le réseau m’aura aussi mise sur le chemin d’une nouvelle aventure professionnelle : le développement de Métis’Gwa, un projet de cirque contemporain initité en 2008 sur une ile située baignée par la mer des Caraïbes, à près de 7000 kilomètres de Paris. De Circostrada, j’aurais gardé une forte appétence pour le travail en réseau, la coopération, l’ouverture à d’autres univers artistiques, à des environnements professionnels différents, des contextes socio-politiques et culturels parfois complexes, toujours passionnants à décoder. En somme, une ouverture et une multiplicité de points de vue qui me tiennent à cœur aujourd’hui d’inscrire dans l’ADN des projets de Métis’Gwa. J’y ai appris, grandi, et nourri un grand réseau d’ami·e·s complices aux quatre coins de l’Europe et du globe qui m’accompagne dans toutes mes aventures, présentes et à venir. Merci Circostrada et comme on dit en Guadeloupe, «Adan Dòt Solèy !» (A un autre soleil !)
Responsable du développement et de l'administration de Métis'Gwa, France